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mercredi 3 août 2016

Le trésor caché dans ta demeure




   Baizhàng Huáihái, alors un humble moine Chán, rendit visite au grand maître Mazŭ Dàoyī.

- Qu'est-ce qui t'amène par ici ? demanda Ma.
- Je viens chercher le Dharma du Bouddha.
- Tu ne vois même pas le trésor caché dans ta propre demeure, alors à quoi bon errer ça et là ? Ici je n'ai rien à te donner, quelle Dharma du Bouddha pourrais-je te donner ?

    Baizhàng s'avança, se prosterna et demanda :

- Qu'est-ce que le trésor de ma propre demeure ?
- Cela même qui est train de m'interroger à cet instant précis constitue ton trésor. Il contient tout ce dont tu as besoin, rien ne manque. Tu es libre d'y puiser, pourquoi continuer à chercher à l'extérieur ?

   À ces mots, Baizhàng s'éveilla à son esprit originel. Débordant de joie, il présenta ses respects à Mazŭ et le remercia.




Kuncan (1612-1673), Paysage après une nuit de pluie torrentielle, 1660





    Voilà une petite histoire du maître Chán, Mazŭ (709–788), et de son disciple Baizhàng (720–814). (Pour rappel, le Chán est plus connu en Occident sous son nom japonais de Zen). Il y est question de trouver l’Éveil, la vérité suprême. La tentation est toujours de trouver la vérité et les bienfaits en-dehors de soi-même : on a appris les mathématiques, l'écriture d'un professeur. Nous n'avions pas ces savoirs en nous au moment de notre naissance. Et tous les bienfaits de l'existence, nous les tenons d'autrui ou d'autre chose : le confort matériel provient de la maison et des richesses dont nous disposons, le bonheur familial provient de la famille, l'amour provient de la personne aimée, la réussite provient du milieu professionnel dans lequel nous évoluons, et ainsi de suite.... Mais la même logique ne fonctionne pas avec la quête spirituelle.


     L’Éveil ne peut pas provenir de l'extérieur. Bien sûr, on peut enseigner les soûtras du Bouddha, les grands textes philosophiques du bouddhisme, les préceptes moraux, les techniques de méditation, tel ou tel rituel, mais tout cela n'est pas la véritable essence du Dharma. La véritable essence ne se donne pas. Personne ne peut vous la donner car elle est en vous. Comment la trouver dès lors si personne ne peut nous indiquer où elle se trouve ? Au fond, nous dit Mazŭ, cet Éveil se trouve dans cette disposition que nous avons en nous de chercher l’Éveil. Dans la philosophie bouddhique, on appelle cela l'esprit d’Éveil, bodhicitta en sanskrit. S'en suit une dialectique subtile où nous avons besoin des autres pour qu'ils nous disent que l’Éveil est en nous. Comme si nous partions à travers monts et par vaux pour trouver le trésor caché dans notre propre demeure. 






Bǎizhàng 






Voir aussi à propos de Mazŭ Dàoyī :


- Polir le charbon pour en faire un miroir



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