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vendredi 12 décembre 2014

L'Étranger


- Qui aimes-tu le mieux, homme énigmatique, dis? ton père, ta mère, ta sœur ou ton frère?
- Je n'ai ni père, ni mère, ni sœur, ni frère.
- Tes amis?
- Vous vous servez là d'une parole dont le sens m'est resté jusqu'à ce jour inconnu.
- Ta patrie?
- J'ignore sous quelle latitude elle est située.
- La beauté?
- Je l'aimerais volontiers, déesse et immortelle.
- L'or?
- Je le hais comme vous haïssez Dieu. 
- Eh! qu'aimes-tu donc, extraordinaire étranger? 
- J'aime les nuages... les nuages qui passent... là-bas... là-bas... les merveilleux nuages!


Charles Baudelaire, L'étranger, Le spleen de Paris







    Charles Baudelaire, dans ce petit poème du recueil "Le Spleen de Paris", nous décrit un étranger qui sent bon le bon sauvage qu'un siècle auparavant Jean-Jacques Rousseau vantait dans ses œuvres philosophiques. Un personnage qui, surtout, n'est pas emprisonné dans les codes de la bourgeoisie dominante, qui n'est pas lié à la respectabilité et aux bonnes convenances d'une famille. Un individu libre qui ne veut contempler la Beauté que déesse et immortelle, un individu singulier dans sa solitude, un individu aérien qui admire la Nature et n'aime rien tant que contempler les nuages dans le ciel.  








Les photos sont de Tartiplume dans les Nuages (son blog ici).

Léo Ferré a mis en musique ce poème :




Voir toutes les citations du "Reflet de la Lune" ici.






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